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Hermione

Où suis-je ? Qu’ai-je fait ? Que dois-je faire encore ? Quel transport me saisit ? Quel chagrin me dévore ? Errante et sans dessein je cours dans ce palais. Ah ! ne puis-je savoir si j’aime ou si je hais ? Le cruel ! de quel oeil il m’a congédiée ! Sans pitié, sans douleur au moins étudiée ! L’ai-je vu se troubler et me plaindre un moment ? En ai-je pu tirer un seul gémissement ? Muet à mes soupirs, tranquille à mes alarmes, Semblait-il seulement qu’il eût part à mes larmes ? Et je le plains encore ! Et pour comble d’ennui, Mon cœur, mon lâche cœur s’intéresse pour lui ! Je tremble au seul penser du coup qui le menace ! Et prête à me venger, je lui fais déjà grâce ! Non, ne révoquons point l’arrêt de mon courroux : Qu’il périsse ! aussi bien il ne vit plus pour nous. Le perfide triomphe et se rit de ma rage : Il pense voir en pleurs dissiper cet orage ; Il croit que toujours faible et d’un cœur incertain, Je parerai d’un bras les coups de l’autre main. Il juge encor de moi par mes bontés passées. Mais plutôt le perfide a bien d’autres pensées : Triomphant dans le temple, il ne s’informe pas Si l’on souhaite ailleurs sa vie ou son trépas. Il me laisse, l’ingrat, cet embarras funeste. Non, non, encore un coup, laissons agir Oreste. Qu’il meure, puisque enfin il a dû le prévoir, Et puisqu’il m’a forcée enfin à le vouloir… À