Page:Racine Théâtre Barbou 1760 tome2.djvu/114

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Trop heureux d'avoir pu, par un récit fidèle,

De leur paix en passant vous conter la nouvelle,

Et m'acquitter vers vous de mes respects profonds,

Je vais le couronner, Madame, et j'en réponds.

Scène III.

Atalide, Zaïre

Atalide

Allons, retirons-nous, ne troublons point leur joie.

Zaïre

Ah, Madame! croyez...

Atalide

Que veux-tu que je croie?

Quoi donc? à ce spectacle irai-je m'exposer?

Tu vois que c'en est fait: ils se vont épouser,

La sultane est contente, il l'assure qu'il l'aime.

Mais je ne m'en plains pas, je l'ai voulu moi-même.

Cependant croyais-tu, quand jaloux de sa foi

Il s'allait plein d'amour sacrifier pour moi,

Lorsque son cœur tantôt m'exprimant sa tendresse,

Refusait à Roxane une simple promesse,

Quand mes larmes en vain tâchaient de l'émouvoir,

Quand je m'applaudissais de leur peu de pouvoir,

Croyais-tu que son cœur, contre toute apparence,

Pour la persuader trouvât tant d'éloquence?

Ah, peut-être, après tout, que sans trop se forcer,

Tout ce qu'il a pu dire, il a pu le penser.

Peut-être en la voyant, plus sensible pour elle,

Il a vu dans ses yeux quelque grâce nouvelle.

Elle aura devant lui fait parler ses douleurs,

Elle l'aime; un empire autorise ses pleurs;

Tant d'amour touche enfin une âme généreuse:

Hélas! que de raisons contre une malheureuse!

Zaïre