Page:Racine Théâtre Barbou 1760 tome2.djvu/364

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35^ P HE D R E,

Excufcz ma douleur. Cette image cruelle

Sera pour moi de pleurs une fource éternelle.

J'ai vu, Seigneur , j'ai vu vçtre malheureux fils

Traîné par les chevaux que fa. main a nourris.

Il veut les rappeller , & fa voix les effraie.

Ils courent. Tout fon corps n'eft bien-tôt qu'une plaie.

De nos cris douloureux la plaine retentit.

Leur fougue impétueufe entin fe ralentit.

Ils s'arrêtent , non loin de ces tombeaux antiques ,

Où des rois fcs ayeux font les froides reliques.

Je cours , en foupirant , Ôc fa garde me fuir.

De fon généreux fang la trace nous conduit.

Les rochers en font teints. Les ronces dégouttantes

Portent de fes cheveux les dépouilles fanglantes.

J'arrive , je l'appelle ; & me tendant la main ,

Il ouvre un œil mourant, qu'il referme foudain :

Le cielj dit-il j rn'arrache une innocente vie.

Prend foin , après ma mort, de la trijle Aricie,

Cher ami , fi mon père un jour défabufé

Plaint le malheur d^un fils faujfement accufé ,

Pour appaifer mon fang 6* mon ombre plaintive ,

Dis-lui qu'avec douceur il traite fa captive ,

QuHl lui rende ... A ce mot ce héros expiré

N'a lailTé dans mes bras qu'un corps défiguré ;

Trifte objet où des dieux triomphe la colère ,

Et que méconnoîtroit l'œil même de fon père.

Thésée. O mon fils \ Cher efpoir que je me fuis ravi ! Inexorables dieux, qui m'avez trop fervi I A quels mortels regrets ma vie eft réfervée l

Thékamene.. La timide Aricie eft alors arrivée. Ellevenoit, Seigneur, fuyant votre courroux , A la face des dieux l'accepter pour époux. Elle approche. Elle voit l'herbe rouge & fumante. Elle voit ( quel objet pour les yeux d'une amante l ) Hippolyte étendu , fans forme & fans couleur. Elle veut quelque temps douter de fon malheur 5

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