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Page:Radcliffe - L’Italien (trad. Fournier), 1864.djvu/146

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De son côté, Vivaldi montrait à sa compagne, sur une hauteur à l’ouest, l’Albe moderne, dominée par les ruines de son ancien château qui fut le tombeau de plusieurs princes dépouillés par Rome.

— C’est dans ces beaux lieux aussi, ajouta-t-il, qu’un empereur romain s’est transporté pour y jouir du spectacle le plus cruel. C’est ici que Claude donna une fête pour célébrer l’achèvement de l’aqueduc qui portait les eaux du lac de Celano à Rome. Un combat naval eut lieu sous ses yeux, où un grand nombre d’esclaves périrent pour son amusement. Ces eaux si pures furent teintées de sang humain et souillées de cadavres au milieu desquels flottaient triomphalement les galères dorées de l’empereur…

— Monsieur, dit Paolo, se hasardant à interrompre son maître, il me vient une idée. C’est que, pendant que nous sommes ici à admirer la nature et à parler de l’antiquité, nos deux carmes pourraient bien être dans quelque coin, prêts à tomber sur nous à l’improviste. Ne ferions-nous pas mieux d’avancer ?

— Tu as peut-être raison, dit Vivaldi, et nos chevaux sont en effet assez reposés.

Ils descendirent la montagne. Elena, silencieuse et abattue, se livrait à ses réflexions sur la gravité du parti qu’elle avait à prendre et dont dépendait toute sa destinée. Tandis que Vivaldi, qui l’observait, tremblait que cette réserve ne fût que l’effet d’une secrète indifférence. Cependant il s’abstint de laisser voir ses craintes et de renouveler ses instances jusqu’à ce qu’il eût placé l’orpheline dans un asile sûr, où elle se trouvât maîtresse d’accueillir ou de rejeter ses offres. Cette délicatesse était, sans qu’il s’en doutât,