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Page:Radcliffe - L’Italien (trad. Fournier), 1864.djvu/62

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ar un abattement que cependant sa raison combattait. Les deux amants se séparèrent en versant des larmes et en s’exhortant mutuellement au courage, malgré les défaillances involontaires qu’ils éprouvaient en secret l’un et l’autre.

Elena, restée seule, s’efforça de se distraire par les apprêts de son départ, qui la menèrent fort avant dans la nuit. La vue de cette maison où elle avait vécu depuis son enfance, et qu’elle allait maintenant quitter pour un monde inconnu, lui inspirait des pensées mélancoliques. Elle croyait voir errer l’ombre de sa tante dans cette chambre où elles avaient passé la soirée ensemble, la veille du fatal événement. Son imagination évoquait des souvenirs à la fois bien tristes et bien doux, lorsqu’elle en fut distraite par un bruit soudain qu’elle entendit au-dehors. Elle leva les yeux et vit plusieurs visages qui semblèrent passer rapidement devant sa fenêtre. Comme elle se levait pour fermer les jalousies, on frappa fortement à la porte d’entrée, puis Béatrice poussa des cris perçants. Bien qu’alarmée pour elle-même, Elena eut le courage de courir au secours de la vieille femme ; mais, en entrant dans un passage qui menait à la salle d’où partaient les cris, elle aperçut trois hommes masqués et enveloppés de manteaux, qui s’élancèrent à sa rencontre. Elle s’enfuit, mais ils la poursuivirent jusque dans la chambre qu’elle venait de quitter. Sa force et son courage l’abandonnaient ; elle leur demanda cependant quel était leur projet. Sans lui répondre, ils lui jetèrent un voile sur la tête et l’entraînèrent vers le portique, malgré ses cris et ses supplications.