Page:Radcliffe - Le confessionnal des pénitents noirs, 1916.djvu/60

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s’était sentie prise d’une sympathie étrange pour la jeune fille ; mais comment eut-elle supposé que cette étrangère pût être sa fille. Que se fût-il passé dans son âme si on lui eut appris que sa généreuse pitié pour une inconnue deviendrait le salut de sa fille, tandis que les vices de Schedoni l’avait poussé sans qu’il le sût à faire périr sa nièce. Le ciel avait fait tourner au triomphe de l’une et à la confusion de l’autre les moyens que tous deux employaient aveuglément, suivant que ces moyens étaient généreux ou pervers.


Quelques jours après les événements que nous venons de raconter, Vivaldi fut remis en liberté. Le marquis n’avait été averti que son fils avait été cité devant le tribunal secret de l’Inquisition que lorsque son innocence fut reconnue. Il s’empressa de venir à Rome. Vivaldi s’étonna de le voir en grand deuil et les yeux rougis par les larmes : il apprit que sa mère était morte. Son père lui confia aussi que lorsque la marquise s’était vue à l’extrémité, déchirée de remords et assiégée de terreur, elle avait envoyé chercher un confesseur dans l’espoir de soulager sa conscience. La première condition que le prêtre attacha au pardon qu’elle implorait fût qu’elle réparât de tout son pouvoir le mal qu’elle avait fait aux autres. Aussi, au moment d’entrer au tombeau, témoigna-t-elle autant d’empressement à favoriser le mariage de Vivaldi et d’Elena qu’elle avait montré d’ardeur à y mettre obstacle. Après avoir avoué l’infâme complot qu’elle avait trâmé contre Elena, elle fit promettre solennellement au marquis Vivaldi qu’il ne s’opposerait plus au mariage de leur fils, si celui-ci persistait dans son attachement pour la jeune fille. Cette promesse calma la marquise qui mourut en le remerciant.

Vivaldi ne voulut point quitter Rome avant que son père n’eut obtenu que Paolo ne fût remis en liberté. Ce fut un moment bien doux pour le jeune comte lorsqu’il vit le lendemain son fidèle serviteur tomber à ses pieds, en fondant en larmes. Il le releva en l’embrassant ; puis le marquis, serrant la main loyale du serviteur de son fils, y glissa une bourse de mille sequins que Paolo voulut refuser, mais que Vivaldi le contrai-