Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T1.djvu/183

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due qu’éclairoit foiblement la lune à travers une haute fenêtre gothique, auroit en d’autres temps réveillé la superstition, mais alors elle ne songeoit qu’à sa douleur. Elle entendit à peine les échos retentir du bruit de ses pas, et ne se souvint de la fosse ouverte que quand elle se vit sur le bord : un frère du couvent y avait été mis la veille au soir. Elle étoit alors seule dans sa chambre, sans lumière : elle avoit entendu de loin les moines qui chantoient un requiem pour le repos de son ame. Toutes les circonstances de la mort de son père s’étoient ravivées dans sa mémoire ; et les voix s’unissant aux accords plaintifs et sourds de l’orgue, l’avoient jetée dans une rêverie sombre et douloureuse. Emilie se rappela toutes ces circonstances, et s’éloignant du monceau de terre, elle avança plus vîte jusqu’au tombeau de Saint-Aubert. Tout-à-coup, dans un coin éloigné du bas côté où tomboient au travers des vitraux quelques rayons de la lune, elle crut voir une ombre qui se glissoit entre les colonnes ; elle s’arrêta pour écouter, mais n’entendant les pas de personne, elle pensa que son imagination l’avoit trompée ; et ne craignant plus d’être observée, elle avança. Saint-Aubert étoit enterré sous un marbre simple, qui ne portoit guère que