Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/127

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pagne appartenoient. Il y joignoit, pour l’amuser, une légère esquisse de leurs caractères. Emilie quelquefois se divertissoit à l’entendre ; mais sa gaîté ne faisoit plus sur madame Montoni le même effet qu’autrefois : elle étoit souvent sérieuse, et Montoni gardoit sa réserve ordinaire.

Rien n’égala l’étonnement d’Emilie en découvrant Venise ; ses islots, ses palais, ses tours, qui, tous ensemble, s’élevoient de la mer, et réfléchissoient leurs couleurs sur sa surface claire et tremblante. Le soleil couchant donnoit aux vagues, aux montagnes élevées du Frioul, qui bornent au nord la mer Adriatique, une teinte légère de safran. Les portiques de martyre et les colonnes de Saint-Marc étoient revêtues des riches nuances et des ombres du soir. À mesure qu’on voguoit, les grands traits de cette ville se dessinoient avec plus de détail. Ses terrasses, surmontées d’édifices aériens, et pourtant majestueux, éclairés comme ils l’étoient alors, des derniers rayons du soleil, paroissoit plutôt tirées de la mer par la baguette d’un enchanteur, que construites par une main mortelle.

Le soleil ayant enfin disparu, l’ombre s’étendit graduellement sur les flots et sur les montagnes ; elle éteignit les derniers