Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/130

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d’abord entendue, passa près de la barque de Montoni, dans une des gondoles qu’on voyoit errer sur la mer au clair de la lune, et tous les brillans acteurs alloient prendre le frais du soir. Presque toutes avoient leurs musiques. Le bruit des vagues sur lesquelles on voguoit, le battement mesuré des rames sur les flots écumans, y joignoient un charme particulier. Emilie regardoit, écoutoit, et se croyoit au temps des fées. Madame Montoni même éprouvoit du plaisir. Montoni se félicitoit d’être enfin de retour à Venise ; il l’appeloit la première ville du monde ; et Cavigni étoit plus sémillant et plus animé qu’à l’ordinaire.

La barque passa sur le grand canal, où la maison de Montoni étoit située. En voguant toujours, les palais de Sansovino et Palladio déployèrent aux yeux d’Emilie un genre de beauté et de grandeur, dont son imagination même n’avoit pu se former l’idée. L’air n’étoit agité que par des sons doux, que répétoient les échos du canal ; et des groupes de masques dansant au clair de lune, réalisoient les brillantes fictions de la féerie.

La barque s’arrêta devant le portique d’une grande maison, et les voyageurs débarquèrent. La terrasse les conduisit, par un