Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/146

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de la nature. Son cœur n’étoit pas ému ; des larmes d’admiration ne s’échappèrent pas de ses yeux comme à la vue d’un océan immense et de la grandeur des cieux, au son des vagues tumultueuses, aux accords d’une musique enivrante. De tels souvenirs dévoient rendre insipide la scène usée qui s’offroit à ses regards.

La soirée se passa sans aucun incident remarquable. Emilie en desiroit la fin, pour se dérober aux empressemens du comte. Les rapprochemens naissent souvent des contrastes. En voyant le comte Morano, elle songeoit à Valancourt, et soupiroit.

Plusieurs semaines s’écoulèrent dans le cours des visites ordinaires. Emilie s’amusoit à considérer un théâtre et des mœurs aussi opposés à ceux de la France ; mais le comte Morano s’y trouvoit trop fréquemment pour sa tranquillité. Ses grâces, sa figure, ses agrémens, qui faisoient l’admiration générale, eussent peut-être attiré aussi celle d’Emilie, si son cœur n’eût été rempli de Valancourt. Peut-être encore eût-il fallu qu’il eût mis plus de modération dans ses poursuites. Quelques traits de son caractère qu’il découvrit dans sa persécution, indisposèrent Emilie sur tout le reste, et la prévinrent contre ses meilleures qualités.