Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/207

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Montoni ne remonta pas la Brenta ; il continua la route en voiture, pour gagner l’Apennin. Pendant ce voyage, ses manières avec Emilie furent si particulièrement sévères, que cela seul eût confirmé ses premières conjectures ; mais elles n’avoient pas besoin de confirmation : elle voyoit sans plaisir la belle contrée qu’elle traversoit. Elle ne pouvoit pourtant s’empêcher de sourire quelquefois aux naïves remarques d’Annette ; parfois aussi elle soupiroit, quand un site d’une rare beauté rappeloit Valancourt à sa pensée. Il s’en éloignoit peu ; mais la solitude où l’on couroit la séquestrer ne lui laissoit aucun espoir d’avoir encore de ses nouvelles.

À la fin, les voyageurs commencèrent à monter au milieu des Apennins. D’immenses forêts de sapins, à cette époque, ombrageoient ces montagnes. La route se dirigeoit au milieu de ces bois, et ne laissoit voir que des roches suspendues encore plus haut, à moins qu’un intervalle entre les arbres ne laissât distinguer un moment la plaine qui s’étendoit à leurs pieds. L’obscurité de ces retraites, leur morne silence, quand un vent léger n’ébranloit pas la cime des arbres, l’horreur des précipices qui se découvroient l’un après l’autre, chaque objet,