Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/208

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en un mot, rendoit plus imposantes les impressions de la triste Emilie ; elle ne voyoit autour d’elle que des images d’une effrayante grandeur et d’une sombre sublimité. D’autres images également sombres, également terribles, accabloient en même temps son imagination. Sachant à peine où elle alloit, sous la domination d’un homme dont le despotisme absolu avoit déjà si cruellement pesé sur elle, au moment d’épouser peut-être un homme qui n’avoit mérité ni son affection, ni son estime, ou d’éprouver, loin de tout secours, tout ce que le courroux, la vengeance, et une vengeance italienne, peuvent dicter ; plus elle considéroit les motifs d’un pareil voyage, plus elle en étoit épouvantée. On vouloit conclure son mariage avec assez de secret pour que sa résistance déterminée ne compromît pas l’honneur de Montoni, ou peut-être même son repos. Ces profondes solitudes, où l’on devoit la plonger ; ce château mystérieux, sur lequel elle avoit reçu de sinistres ouvertures, faisoient frémir son cœur, et la mettoient au désespoir. Elle éprouvoit que, déjà rempli par la douleur, son esprit étoit encore susceptible d’en recevoir l’accroissement, que des circonstances locales pouvoient faire naître.