Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T2.djvu/80

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la permission de dire adieu à Emilie. Mais quand Valancourt apprit qu’elle alloit partir sous peu de jours, et qu’on avoit décidé qu’il ne la verroit plus, il perdit toute prudence ; et dans une seconde lettre il proposa à Emilie de former un mariage secret. Cette lettre fut livrée à madame Montoni, et la veille du départ arriva sans que Valancourt eût reçu une seule ligne de consolation, ou le moindre espoir d’une dernière entrevue.

Cependant Emilie étoit abîmée dans cette espèce de stupeur où des malheurs subits et sans remède peuvent quelquefois plonger l’esprit. Elle aimoit Valancourt avec la plus tendre affection ; elle s’étoit accoutumée long-temps à le regarder comme l’ami et le compagnon de sa vie entière ; elle n’avoit pas une idée de bonheur à laquelle son idée ne fût jointe. Quelle devoit donc être sa douleur au moment d’une séparation si prompte, peut-être éternelle, et à un éloignement où les nouvelles de leur existence pourroient à peine leur parvenir, et cela pour obéir aux volontés d’un étranger, à celles d’une personne qui récemment encore provoquoit leur mariage ? Vainement essayoit-elle de surmonter sa douleur, et de se résigner à un malheur inévitable. Le