Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T3.djvu/186

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’eut pas cet affreux spectacle. En avançant, elle distingua des voix. La crainte de paroître devant tant d’étrangers, la crainte sur-tout d’irriter Montoni par une visite imprévue, ébranlèrent presque sa résolution. Elle cherchoit des yeux, sous les longues arcades, un domestique pour l’annoncer ; il n’en paroissoit point. Les accens qu’elle entendoit n’étoient point ceux de la colère. Elle reconnut les voix de quelques convives de la veille. Elle alloit frapper quand Montoni parut lui-même. Emilie trembla, devint muette ; et Montoni, dans une extrême surprise, peignit sur sa physionomie tous les mouvemens qui l’agitoient. Emilie oublia ce qu’elle avoit à dire ; elle ne s’informa pas de sa tante ; elle ne demanda rien pour Annette, et resta pétrifiée.

Montoni lui demanda d’un ton sévère ce qu’elle avoit entendu de l’entretien. Elle l’assura qu’elle n’étoit point venue dans l’intention d’écouter ses secrets, mais d’implorer sa clémence, et pour sa tante, et pour Annette. Montoni parut en douter. Il la regarda fixement avec des yeux perçans ; et l’inquiétude qu’il ressentoit ne pouvoit venir d’un intérêt frivole. Emilie finit par le conjurer de lui permettre de visiter sa