Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T6.djvu/210

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ger Emilie dans une douce mélancolie ; elle répéta ses anciennes romances ; et les souvenirs qu’elles réveilloient, devenant toujours plus touchans, ses larmes tombèrent sur le luth, et elle ne put continuer.

Le soleil avoit disparu derrière le sommet des montagnes, leurs plus hautes pointes ne recevoient plus sa lumière, Emilie ne quittoit point la tour, et s’y livroit à ses rêveries. Elle entendit marcher, elle tressaillit, et regardant à la grille, elle reconnut en bas M. de Bonnac. Elle retomba dans la rêverie, dont cette distraction l’avoit tirée ; après quelques momens, elle reprit son luth, et chanta son air favori. Elle entendit encore marcher ; elle écouta, on montoit à la tour. L’obscurité lui inspira un peu de crainte ; autrement elle n’en eût éprouvé aucune, puisque M. de Bonnac venoit de passer. Les pas étoient rapides et légers ; la porte s’ouvrit, et le crépuscule mourant déroba au premier instant les traits d’une personne qui entroit : mais Emilie pouvoit-elle se méprendre au son de la voix ? c’étoit celle de Valancourt. Emilie, qui jamais ne l’avoit entendue sans émotion, troublée de surprise et de plaisir à la fois, l’eut à peine vu à ses pieds, qu’elle tomba sur une chaise. Tant de mouvemens