Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T6.djvu/50

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le remords, et le sentiment des devoirs qu’elle alloit embrasser dans notre état, a causé à la fin le dérangement de sa raison. D’abord elle étoit ou violente ou abattue par intervalles ; elle prit ensuite une mélancolie habituelle ; elle est parfois troublée par des accès de délire tel que le dernier, et depuis quelque temps ils sont plus fréquens.

Emilie fut touchée de cette histoire, dont quelques traits rappeloient à son souvenir celle de la marquise de Villeroy. Son père aussi l’avoit forcée d’abandonner l’objet de son affection ; mais le récit de Dorothée ne donnoit pas lieu de supposer, ou qu’elle eut échappé à la vengeance d’un mari jaloux, ou que son innocence n’eût pas été entière. Emilie néanmoins, en soupirant sur les malheurs de la religieuse, ne put s’empêcher de donner quelques larmes aux infortunes de la marquise. Elle reparla ensuite de sœur Agnès, et demanda à la sœur Françoise si elle se ressouvenoit qu’en sa jeunesse elle eût été très-belle.

— Je n’étois pas ici quand elle a fait ses vœux, reprit Françoise. Il y a long-temps, et je crois que peu de nos sœurs actuelles ont assisté à la cérémonie ; notre mère abbesse même n’étoit pas alors au couvent. Je