Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T6.djvu/49

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pu déjà vous le faire soupçonner ; mais je ne veux pas déshonorer son nom en le révélant. L’amour fut l’occasion de son crime et de sa folie. Elle fut aimée par un gentil-homme très-peu riche ; et son père, à ce que j’ai appris, l’ayant mariée à un seigneur qu’elle haïssoit, une passion mal contenue fit sa perte : elle oublia la vertu et ses devoirs ; elle profana les vœux du mariage : ce crime fut découvert, et son époux l’eût sacrifiée à sa vengeance, si son père n’eût trouvé moyen de la mettre hors de son pouvoir. Je n’ai jamais pu découvrir comment il avoit réussi. Il l’enferma dans ce couvent, et la détermina à y prendre le voile. On répandit dans le monde qu’elle étoit morte ; le père, pour sauver sa fille, concourut à confirmer ce bruit, et fit même croire à son époux qu’elle étoit une victime de sa fureur jalouse. — Vous paroissez surprise, ajouta la religieuse en regardant Emilie ; j’avoue que l’histoire n’est pas commune, mais elle n’est pourtant pas sans exemple.

— De grâce, continuez, dit Emilie, elle m’intéresse.

— Vous savez tout, reprit la sœur ; je vous dirai seulement que le combat qui se passa dans le cœur d’Agnès entre l’amour,