heureux ; tout revenoit avec une nouvelle force à l’esprit d’Emilie, et réveilloit tout ce qu’elle avoit souffert. Sa tendresse pour Valancourt redevint alors ce qu’elle avoit été lorsqu’elle s’éloignoit à la fois de lui et du bonheur ; lorsque la raison, triomphant de la douleur, l’avoit détournée de blesser sa conscience en contractant un mariage clandestin. Hélas ! se disoit Emilie, qu’ai-je gagné à cet effort ? Suis-je heureuse ? Il me disoit que jamais nous ne serions heureux ! Hélas ! qu’il étoit loin de penser que sa propre conduite seroit le principal obstacle à notre bonheur, et l’unique principe du mal qu’il redoutoit !
Ces réflexions augmentèrent son affliction ; elle fut pourtant obligée de reconnoître que le courage qu’elle avoit montré l’avoit du moins préservée d’un malheur irréparable. Mais Valancourt ! Elle ne pouvoit, à cette idée, se féliciter de la prudence qui la sauvoit : elle accusoit amèrement les circonstances qui avoient conspiré pour trahir Valancourt, et qui l’avoient plongé dans un état si différent de ce que ses vertus, son goût, ses premiers ans annonçoient ; elle l’aimoit trop encore pour croire à la dépravation de son cœur, malgré sa conduite criminelle. Elle se rappela cette