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LE BAL DU COMTE D’ORGEL

du comte et de la comtesse d’Orgel prouvait un accord que donne seul l’amour ou l’habitude.

Pouvait-on accuser Anne de ne devoir qu’à l’habitude son entente avec Mahaut ? Non, la comtesse avait assez d’amour pour tous deux. Son amour était si fort qu’il déteignait sur Anne et faisait croire à la réciprocité. François ne devinait rien de cela. Il avait en face de lui un couple tendrement uni. Cette union lui faisait plaisir. Il éprouvait un sentiment bien distinct de ceux dont il avait l’habitude. Chez lui la jalousie précédait l’amour. Cette fois son esprit n’accomplissait pas sa besogne. François ne cherchait pas dans ce ménage une fissure par où s’introduire. Il avait autant de plaisir à voir Mme d’Orgel danser avec son mari que si lui-même eût dansé avec elle. Il les enviait, bouche bée, ne répondant pas à Hester Wayne, ne l’entendant même pas, se disant que s’il pouvait prétendre à un

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