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Page:Rague - Jane Austen, 1914.djvu/186

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pas indifférente aux beautés de la nature ; elle affirme même que la contemplation d’un joli panorama doit faire partie des joies du paradis. Mais là encore, elle ne se laisse pas emporter par son enthousiasme. Elle ne recherche pas les paysages aux lignes insolites et désordonnées, et le plus grand éloge qu’elle puisse faire d’un site harmonieux, est de le qualifier « de tout à fait anglais ». Ses goûts ne sont pas très éloignés de ceux d’Edward Ferrars. « Elle n’aime pas les arbres difformes, tordus, brûlés par la foudre. Elle les préfère hauts, droits et verdoyants. Elle ne trouve aucun « charme aux cottages délabrés et en ruines. Elle prend plus de plaisir à la vue d’une gentille ferme qu’à celle d’une vieille tour de guet ; et une troupe de villageois joyeux et propres lui semble plus agréable que les plus superbes bandits du monde » [1]. Il faut tenir compte, il est vrai, qu’il y a là une sorte de réaction contre les enthousiasmes d’emprunt, contre les criailleries éperdues d’admiration qui étaient alors à la mode dans la société soi-disant cultivée. C’est toujours la même répulsion pour tout ce qui sent l’affecté, le convenu, le lieu commun, et cela l’empêche de s’abandonner autant qu’elle le voudrait à ses émotions. Car elle est persuadée que l’amour vrai de la nature est sain et bienfaisant ; en présence d’une belle nuit étoilée d’été, pleine de solennité et d’apaisement, elle fait dire à Fanny Price : « Par une soirée comme celle-là, je ne peux croire que le mal et la souffrance existent ici-bas ; et tous deux seraient fort diminués, si les hommes prêtaient un peu plus d’attention à la beauté de la nature, se montraient plus sensibles à la majesté d’un tel spectacle » [2].

Ainsi, elle croit que les émotions esthétiques peuvent

  1. Raison et Sensibilité.
  2. Mansfield Park.