encore plus de soins à sa mère qui vieillit ; et elle reste pour ses neveux et nièces une camarade pleine d’entrain, la confidente préférée, prêchant avec humour la prudence et la réflexion à celles qui sont en âge de se marier, écrivant des lettres à l’envers pour amuser les enfants. C’est surtout elle qui égaie les réunions de famille, toujours prête à se mettre au piano pour faire danser les jeunes, à chanter une romance pour distraire ceux dont les années ont rouillé les jambes.
Les romans se succédaient régulièrement. Emma parut en décembre 1805[1], toujours sans nom d’auteur. Comme ses aînés, il trouva un accueil sympathique auprès d’un petit nombre d’esprits raffinés, sans soulever l’enthousiasme du public. Le moment était d’ailleurs assez peu favorable ; Walter Scott accaparait l’attention avec Waverley et Guy Mannering. Et il entre peut-être un peu de dépit personnel dans ce passage d’une lettre de Jane à sa nièce Anna, impatiente de publier ses jeunes productions : « Ce n’est pas l’affaire de Walter Scott d’écrire des romans, surtout de bons romans ; ce n’est pas loyal. Il a assez de renommée et de profit comme poète, et ne devrait pas arracher le pain de la bouche des autres. »
Une renommée encore bien modeste prenait lentement consistance, lorsqu’une longue maladie mina peu à peu la santé de Jane Austen. À la fin de 1815, elle se surmena en soignant son frère Henry et rentra épuisée à Chawton. À peine arrivée, elle apprit que la banque à laquelle il était associé, et où ses autres frères avaient d’importants dépôts d’argent, venait de faire faillite. Ce fut un choc très pénible pour Jane, toujours très sensible aux moindres contrariétés des membres de sa famille. Au lieu de se refaire, ses forces déclinèrent de plus en plus. Elle dut renoncer aux longues courses à pied avec Cassandra, se contenter de promenades dans une petite voiture à âne, puis restera la maison.
Là, elle voulut encore s’occuper du ménage ; mais
- ↑ WS : 1815