Page:Raguey - Le Buste voilé, Roman complet no 19, 1916.djvu/43

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auprès de ma bien-aimée, cherchant peut-être à s’en faire écouter, et à la séduire par le brillant appât de sa grande fortune. Il est vrai que Pia m’avait dit un soir que, fatiguée de ses assiduités, elle lui avait fait comprendre qu’il emploierait mieux son temps à tenir compagnie à sa sœur ; mais que celui-ci avait répondu que miss Margaret n’avait pas besoin de mentor et qu’elle était libre de passer son temps où et comme il lui plaisait.

Cette situation commençait à me peser singulièrement. Je vis donc arriver avec bonheur le jour du départ. Mais cette fois je ne m’éloignai pas sans avoir vu Pia, qui me dit en me regardant le sourire sur les lèvres et les pleurs dans les yeux : « ricordatevi della serpe ».

Elle faisait allusion au serpent que nous avions vu dans le chemin creux, et dont son imagination superstitieuse croyait voir une image dans la jeune Américaine.

À peine de retour à la villa de Montepulciano, je me mis au travail avec une ardeur presque fiévreuse ; j’avais hâte de terminer le buste de miss Palmer, sans éprouver la moindre envie d’entreprendre celui de sir Edwards. Chaque jour, la jeune fille venait une ou plusieurs fois dans mon atelier. Elle se montrait de plus en plus aimable, et me louait de la façon heureuse dont j’avais saisi les moindres traits de son visage. Un jour cependant elle ajouta une critique.