Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol1.djvu/148

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« Grand roi, je viens te dire adieu ; car tu es, prince auguste, notre seigneur. Jette un regard favorable sur moi, qui pars à l’instant pour habiter les forêts. Daigne aussi, maître de la terre, donner congé à Lakshmana comme à la belle Vidéhaine, mon épouse. Car tous deux, refusés par moi, n’ont pu renoncer à la résolution qu’ils avaient formée de s’en aller avec moi habiter les forêts. Veuille donc bien nous donner congé à tous les trois. »

Quand le maître de la terre eut connu que le désir de prendre congé avait conduit Râma dans son palais, il fixa le regard d’une âme consternée sur lui et dit, ses yeux noyés de larmes :

«  On m’a trompé, veuille donc imposer le frein à mon délire et prendre toi-même les rênes du royaume. »

À ces mots du monarque, Râma, le premier des hommes qui pratiquent religieusement le devoir, se prosterna devant son père et lui répondit ainsi, les mains jointes : «  Ta majesté est pour moi un père, un gourou, un roi, un seigneur, un dieu ; elle est digne de tous mes respects ; le devoir seul est plus vénérable. Pardonne-moi, ô mon roi ; mais le mien est de rester ferme dans l’ordre que m’a prescrit ta majesté. Tu ne peux me faire sortir de la voie où ta parole m’a fait entrer : écoute ce que veut la vérité, et sois encore notre auguste monarque pendant une vie de mille autres années. »

À peine eut-il entendu ce langage de Râma, le roi, que liait étroitement la chaîne de la vérité, dit ces paroles d’une voix que ses larmes rendaient balbutiante : «  Si tu es résolu de quitter cette ville et de t’en aller au milieu des bois pour l’amour de moi, vas-y du moins avec moi, car abandonné par toi, Râma, il m’est impossible de vi-