Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/115

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur-Loire. En 1615, il fait paraître le fameux Traité d’économie politique, qu’il dédie au roi (Louis XIII) et à la reine-mère (Marie de Médicis). Les guerres de religion remplissent la fin de sa carrière déjà si mouvementée. Montchrétien, à peu près certainement catholique jusque là, mais aigri peut-être de ne point voir suivre ses conseils, se jette dans le parti protestant, se bat avec des fortunes diverses à Jargeau, à Sancerre, à Sully et à la Rochelle, organise un soulèvement des huguenots en Normandie, et finalement se fait battre et tuer le 7 octobre 1621, à Tourailles, près de Domfront, par Claude Turgot, capitaine du parti du roi et ancêtre du fameux ministre Turgot.

Le Traité d’économie politique est divisé en quatre livres. Le premier traite des arts économiques, de leur ordre et de leur utilité, du règlement des manufactures et de la distinction des métiers les plus profitables aux communautés. Le deuxième est consacré au commerce intérieur et extérieur — ce qui amène l’auteur à étudier la question de la monnaie. : — Le troisième livre s’occupe de la navigation, des colonies et du commerce avec l’Orient. Enfin, le quatrième, intitulé « de l’exemple et des soins principaux du prince », est rempli par des conseils donnés au prince sur les sujets les plus variés, la piété et la charité, la milice et les finances, les charges et les magistratures, etc. Dans son ensemble, d’ailleurs, le traité n’est qu’un recueil d’avis pratiques : Montchrétien, en effet, n’a ni théorie, ni méthode didactique, et s’il a inventé le nom de l’économie politique, personne ne peut revendiquer pour lui la gloire d’en avoir fondé, ni même d’en avoir entrevu la science. Il doit être placé encore parmi les écrivains mercantilistes[1] ; mais çà et là aussi émergent des idées très saines, fécondes non moins qu’originales, par exemple sur

  1. « Que Vos Majestés ne permettent point que l’on apporte les ouvrages de main qui procèdent de l’art des hommes, ni que l’on emporte les matières et denrées crues de ce royaume » (Livre II).