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Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/154

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1766 à 1793 ; ce fut encore que les physiocrates, par réaction à la fois contre Law et contre Colbert, ne virent d’autre productivité économique que la productivité matérielle de la nature ; enfin, ce fut une démoralisation profonde de l’aristocratie française, à laquelle déjà les fortes et solides vertus qui découlent d’un christianisme sincère commençaient à manquer, et qui s’acheminait, à travers la débauche, vers le mouvement philosophique et révolutionnaire où elle allait disparaître.

Quant à la Compagnie des Indes, détachée à nouveau de la Banque, elle se prolongea jusqu’en 1770, où, écrasée de dettes et ruinée moins par sa mauvaise administration que par la politique de Louis XV, elle abandonna son actif au roi, qui promit une rente à ses actionnaires. Dès lors on eut la liberté, du commerce lointain, sauf quelques restrictions momentanées comme celle qui résulta de la création d’une nouvelle Compagnie des Indes, instituée pour sept ans par de Galonné en 1785, puis dissoute en 1790.

Le mercantilisme, comme école doctrinale, finit avec les financiers, Melon, Dutot et Forbonnais, dont les deux premiers reflétaient les fausses théories de Law en matière de crédit.

Melon, originaire de Tulle, successivement secrétaire du cardinal Dubois, de Law et du Régent, puis avocat à Bordeaux[1], est l’auteur d’un Essai politique sur le commerce qui parut en 1734. Le volume obtint le suffrage de Voltaire, sous certaines restrictions, sans qu’éloges ou critiques nous impressionnent bien vivement, venant d’un philosophe dont les idées économiques étaient aussi peu saines et peu éclairées que celles de Voltaire. Melon est le premier qui ait vraiment fait en France la théorie du système mercantile, mais avec une modération qui le fait

  1. Il est bon de compléter la notice biographique de Daire, dans les Économistes financiers de Guillaumin, par le travail très consciencieux et très complet de M. Rebière, Jean-François Melon l’économiste, Tulle, 1896.