Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/196

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plus grande partie, le prix de la vente de la première main des productions qu’elle fait naître[1] ». Et Dupont de reconnaître en note — comme rédacteur en chef du Journal de l’agriculture — que « ce mémoire est peut-être le plus fort, le plus suivi, le plus serré » qui ait été fait contre le système du Tableau économique. Tout cela, il est vrai, pour mieux amorcer le public !

Que restait-il à riposter ? Quesnay se chargea de réfuter son pseudonyme sous un autre pseudonyme[2]. Mais nous ne pouvons nous empêcher de penser que la réplique ne vaut pas l’objection. L’adversaire disait que « la classe stérile contribue au moins à la valeur vénale des productions qu’elle achète de la classe productive » : Quesnay lui répond que la classe stérile « n’y contribue pas plus que la classe productive ne contribue à la valeur vénale de ce qu’elle achète à la classe stérile ; et que ses achats se contrebalancent de part et d’autre, de manière que leur effet se réduit de part et d’autre à des échanges de valeur pour valeur égale » ; il répond qu’il faut « distinguer la valeur des productions renaissantes de la valeur des dépenses purement en frais, car une dépense n’est pas une production…, et que la classe stérile, ne vendant que des valeurs de pures dépenses en frais, n’est pas productive du prix de ces ventes[3] ». Aussi la classe stérile, « comme elle ne produit rien et qu’elle ne travaille que pour la consommation, ne peut subsister que par les richesses de la nation, c’est-à-dire par les richesses que la classe productive fait naître[4]. ». Dupont appelait l’objection le sophisme de la source et de la corde, « parce que la corde sert à puiser l’eau que la source produit et parce que les esprits

  1. Ibid., pp. 381-382.
  2. Journal de l’agriculture, janvier 1766, sous le pseudonyme du « meilleur ami de M. H. » (voyez Oncken, pp. 384 et s.). — C’est Dupont, dans sa Notice abrégée de 1769, qui a révélé ces pseudonymes.
  3. Op. cit., Oncken, p. 389. — Item, Du commerce, premier dialogue entre M. H. et M. N., Oncken, p. 453.
  4. Ibid., p. 391.