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siècle des observations et des travaux de Frédéric Le Play. Au moins l’école de la « réforme sociale », qu’il a fondée et dont il reste l’inspirateur, est-elle le centre le plus vivant de ces études.

Frédéric Le Play, né en 1806, près d’Honfleur, fils d’un modeste officier des douanes, était sur le point de se faire simple géomètre de village quand il entra à l’École polytechnique. Il fut reçu premier à l’École supérieure des mines en 1827, et s’y lia avec Jean Raynaud, le futur auteur de Terre et Ciel, destiné à avoir une place parmi les mystiques du socialisme. Nommé ensuite professeur à cette École, il consacrait la moitié de l’année à de longs voyages à travers l’Europe, pendant lesquels il étudiait, non seulement l’industrie et particulièrement l’Industrie minérale, mais encore les mœurs et les moyens d’existence des populations des villes et des campagnes[1].

Ses plans de réforme germaient lentement dans son esprit.

En 1848, il quitte l’École des mines pour se consacrer à une sorte de prédication sociale, en vulgarisant ses idées. Sa première œuvre fut les Ouvriers européens (1854), recueil de trente-six monographies de familles, qui représentaient le fruit de vingt années d’observations et de travail. Il y donnait, sous forme de conclusion, l’ensemble des institutions et des mœurs qu’une longue expérience et le témoignage unanime des autorités sociales lui commandaient de regarder comme indispensables à la prospérité d’un peuple.

Le Play était avant tout un homme pratique. Il organisa dans l’Oural les mines immenses que le prince Demidoff avait mises sous sa direction. En France, il fut com-

  1. Outre les ouvrages de Le Play, nous recommandons d’une manière toute particulière le volume fort bien documenté de M. E. de Curzon, Frédéric Le Play, sa doctrine et ses œuvres, 1899 ; — Charles de Ribbe, Le Play d’après sa correspondance, 2e édition, 1906 ; — Vignes, la Science sociale d’après les principes de Le Play, 2 volumes, 1897.