croire que des lois de ce genre, toutes tirées du principe de l’intérêt personnel et de la loi du moindre effort, régissent invariablement et en détail, toujours et partout, les phénomènes les plus compliqués du commerce, de la banque et de l’industrie, à tel point que les relations historiques et les formes diverses des civilisations soient tout simplement des conditions plus ou moins favorables à l’exercice de ces lois universelles et constantes. De plus, poursuit-on, si le principe du moindre effort était exact, la renonciation à un avantage quelconque serait une absurdité et un non-sens : pourtant les actes généreux de dépouillement volontaire sont des faits historiques qui ne peuvent pas être niés. Enfin il est faux que l’intérêt personnel, comme les économistes l’entendent ; soit l’unique moteur du genre humain, puisque l’unique force impulsive à laquelle les volontés obéissent, est la recherche du bonheur, par quelques voies diverses que chacun s’efforce d’atteindre ce bonheur qu’une nécessité irrésistible de sa nature le contraint de convoiter : et moindre effort ou bonheur ne sont pas la même chose[1].
Voilà l’argumentation, présentée loyalement, croyons-nous et dans toute sa force[2]. Cependant nous la jugeons impuissante à renverser la théorie des lois économiques, telles que les économistes les ont décrites.
Voici ce qu’il faut répondre :
1° En ce qui concerne la rigidité de ces lois et l’unité du mobile de nos actes, nous ferons remarquer que les économistes n’ont jamais exclu les mobiles autres que l’intérêt économique, quoiqu’ils se soient attachés à décrire seulement l’action de celui-ci comme si l’étude des autres ne
- ↑ Le R. P. Pesch, adversaire des lois économiques, a particulièrement développé cet argument dans ses Philosophische Grundlagen des œkonomischen Liberalismus, Fribourg-en-Brisgau, 1899, pp. 163 et s.
- ↑ Nous avons résumé ici, aussi brièvement que possible, une quarantaine de pages du R. P. Pesch. Elles renferment en faveur de l’historisme un long plaidoyer contre les Irrthümer des Historismus de Karl Menger.