Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/619

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

giques des doctrines mûrement réfléchies de communisme, faisant partie intégrante de leur symbole. Quant aux Vaudois, les tendances communistes qu’on leur a prêtées, sont, avec plus de vraisemblance encore, démenties par l’histoire[1].

Au contraire, vers la fin du XIIIe et le commencement du XIVe siècle, un assez grand nombre de sectes essayèrent de faire du communisme, en procédant de l’idée de la pauvreté volontaire, que les Franciscains, solennellement reconnus en 1215 au concile de Latran, venaient de réhabiliter et d’embrasser. Dans le sein même de l’ordre une scission s’opéra. Les spirituels se détachèrent de leurs communautés ; ils préconisèrent, parmi les laïques même, le dépouillement des biens, et ils finirent par prêcher le pur communisme sous le couvert d’une plus haute perfection religieuse.

Bientôt l’immoralité et l’hérésie pénétrèrent dans les rangs de leurs disciples. Parmi les nombreuses sectes qui naquirent de ces scissions, il convient de mentionner les Fraticelles, Frérots ou Bizoches, qui se montrèrent dans la Marche d’Ancône vers 1260 ; les Apostoliques, successivement condamnés en 1285 par le pape Honorais IV et en 1290 par le pape Nicolas IV ; les Begghards ou Béguins, qui appartiennent plus particulièrement aux pays germaniques et qui furent condamnés en 1311 au concile de Vienne (en Dauphiné) convoqué par Clément V. En Italie, les Apostoliques allèrent jusqu’à fomenter la guerre civile. Celle-ci ne fut pas même terminée par la défaite et le supplice de leur chef Ségarel en 1304 ; elle se continua

  1. Sudre, Histoire du communisme, 5e éd.,1850, pp. 85 et s. ; — Thonissen, op. cit., 1.1, pp. 152 et s. — C’est donc à tort que les anciens panégyristes du socialisme, comme Louis Blanc dans l’Histoire de la Révolution française (t. 1, ch. i) ou comme Cabet et Villegardelle, se réclament d’une parenté philosophique et sociale avec les hérésies du milieu du moyen âge. — Brants, ce pendant, dans ses Théories économiques aux XIIIe et XIVe siècles, n’absout pas ces sectes diverses du reproche d’avoir voulu renverser la propriété (Op. cit., pp. 268 et s.).