Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/63

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Au commencement du XIIIe siècle, par exemple, Robert de Courçon, archevêque de Paris, ne permettait pas aux avocats de vendre leurs consultations, c’est-à-dire de recevoir des honoraires. La même opinion réapparaît encore chez Nifo, au commencement du XVIe siècle[1].

Mais c’est en matière de prêt à intérêt que l’influence des idées économiques des théologiens fut la plus puissante et la plus durable, et nous nous arrêterons un peu plus longtemps sur ce sujet.


IV

LA PRODUCTIVITÉ DU CAPITAL ET LE PRÊT À INTÉRÊT

Les scolastiques ne dégagent pas ex professo le concept du capital. S’il y a vraiment là une catégorie économique, contemporaine pour ainsi dire du premier homme et du premier effort qu’il fit en vue de satisfaire ses besoins, il n’en est pas moins vrai que l’idée n’en fut isolée que beaucoup plus tard, et que c’est avec Adam Smith seulement qu’elle apparaît en pleine lumière.

Bien plus, le capital existait-il au moyen âge ? Oui, si on donne à ce mot le sens que les économistes « orthodoxes » ont consacré. Mais au dire de l’école historique, « de toutes les définitions économiques, c’est là une des plus irréelles et des plus fantaisistes[2] », et le capital n’aurait pas même existé. Nous reviendrons plus tard, avec Rodbertus et Lassalle, sur leur notion du capital considéré comme une catégorie historique, notion mille fois plus fantaisiste que toutes celles qu’il leur plaît de reprocher aux économistes proprement dits.

Quoi qu’il en soit, sans employer le mot « capital », l’Église et la théologie catholique ont toujours reconnu le droit du

  1. Voir sur ce sujet Brants, op. cit., p. 130. — Auguste Nifo, de Sienne, auteur d’un traité De divitiis, 1531.
  2. Ashley, op. cit., 3e éd. angl., t. I, pp. 43 et s.