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que la misère, et Enfantin poursuivi fut condamné par la cour d’assises, avec Rodrigues, Michel Chevalier et quelques autres, le 27 avril 1832. Quelques-uns partirent ensuite pour Lyon, où il3 fondèrent l’association des « Compagnons de la femme », toujours hantés par l’idée de la « Femme Messie[1] ».

Ainsi finit l’aventure[2].

Mais, disparu, le saint-simonisme intéresse toujours l’économie politique par le principe de la préoccupation collective que doivent inspirer les intérêts matériels ; par l’essor qu’il a contribué à donner aux grandes tentatives de l’industrie ; enfin, par sa théorie entièrement nouvelle de l’État initiateur et moteur du progrès. Tout cela, sans tenir compte du caractère nettement socialiste que l’utopie revêtit après la mort du maître. Aussi ne faut-il pas s’étonner de la part que Stuart Mill a faite plus tard au saint-simonisme dans ses Principes d’économie politique[3]. Le saint-simonisme a donc eu une très réelle influence sur l’élaboration des doctrines de socialisme d’État.

On comprend plus difficilement que Fourier ait été pris au sérieux. Il l’a été cependant ; on cherche même actuellement à le réhabiliter, et M. Charles Gide professe une véritable admiration pour lui. Au demeurant, Fourier n’est qu’un fou, mais un fou d’imagination, dirons-nous, et non pas même un « fou de génie ».

Charles Fourier (1772-1837), né à Besançon, fut toute sa vie employé de commerce ou courtier, à Lyon notamment. Il débuta en 1808 par sa Théorie des quatre mouvements[4], où tout son système se trouvait déjà en germe[5].

  1. Sur la suite de la destinée d’Enfantin, voyez Isambert, op. cit., pp. 189 et s.
  2. Il faut lire, pour s’amuser, la description des derniers mois du saint-simonisme dans Reybaud, op. cit., Études sur les Réformateurs et socialistes modernes, éd. de Bruxelles, 1849, pp. 131-152.
  3. Principes d’économie politique, 1. II, ch. i, § 4.
  4. Imprimé à Lyon, mais sous le faux nom de lieu de Leipsick.
  5. Les autres ouvrages de Fourier sont l’Association domestique-agricole (1822), rééditée plus tard sous le nom de Traité de l’unité universelle ;