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CHAPITRE III

LA RENAISSANCE

Le XVe et XVIe siècles, si brillants l’un et l’autre par l’éclat que les arts y jetèrent, et agités tous deux — le XVIe siècle surtout — par des dissensions et des guerres religieuses qui changèrent la face de l’Europe septentrionale, marquèrent à peine leur sillon dans le champ de l’économie politique. Ils ne virent éclore aucune théorie nouvelle, sinon les premières ébauches du mercantilisme et la théorie quantitative de la valeur, d’après laquelle les existences d’or et d’argent commandent les prix ; et les changements économiques qui s’accomplirent au cours de leur durée, ne parurent reposer sur aucun système original et hardi. Les discussions théologiques absorbaient les esprits ; la philosophie sommeillait en attendant des penseurs profonds ou subtils comme Descartes, Leibnitz et Spinosa ; l’histoire se déroule donc d’elle-même, sans que la grande évolution politique et sociale que les années apportaient, cherchât de parti pris à suivre la route que quelque penseur nouveau aurait pu lui tracer. Le culte de l’antiquité suffisait aux esprits de ce temps là. Or, les sages de la Grèce et de Rome n’avaient pas pensé en économie politique. Pourquoi se serait-on donc lancé dans une voie où l’on n’aurait pas pu les avoir pour modèles ? Pourquoi se serait-on aventuré à écrire des livres qui n’eussent pas reposé sur l’autorité de Tite-Live ou de Plutarque ?

L’Allemagne, dans le mouvement commercial et scientifique, avait pris alors une avance considérable sur la France, que les interminables calamités de la guerre de Cent ans