Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/117

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Elles sont empreintes d’une haute beauté morale. On peut dire avec un historien célèbre que dans cette circonstance, il parla avec cette sagesse affectueuse et modérée que la mort imprime aux plus énergiques caractères, comme si le calme de la vie future, déjà répandu dans tout l’homme, avait chassé les faiblesses humaines, et dépouillait les sentiments et les paroles de leur ancienne âpreté.[1] Le lendemain ce fut le tour des ministres ses collègues. Il les fit venir dans sa chambre, et, repassant devant eux les principaux événements de sa vie, il protesta qu’il avait toujours eu pour but la gloire de Dieu, qu’il avait toujours enseigné aussi fidèlement qu’il lui avait été possible, que jamais, à son escient, il n’avait corrompu un seul passage des Saintes-Ecritures. Mais ici, malgré toutes ces protestations, dont je ne suspecte pas la sincérité, je retrouve Calvin, à son lit de mort, tel qu’il fut pendant sa vie. C’est toujours la même foi, et la même énergie du sentiment moral ; mais ce sont toujours aussi les mêmes convictions absolues, la même âpreté du caractère :

L’église de Berne, dit-il, a trahi celle-ci, et ils m’ont toujours plus craint qu’aimé, et je veux bien qu’ils sachent que je suis mort en cette opinion d’eux qu’ils m’ont plus craint qu’aimé, et encore me craignent plus qu’ils ne m’aiment, et ont toujours eu peur que je ne les troublasse en leur eucharistie.

  1. Guizot. Vie de Calvin, dans le Musée des protestants célèbres, t. II.