Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/120

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tyranniques. Pour croire avec énergie, il suffit de quelque fermeté dans l’esprit et dans l’âme ; mais les convictions impérieuses appartiennent à ces hommes entiers, qu’offense la contradiction et qui ne se consolent pas de n’être pas à la place de Dieu. Le langage de Calvin à l’église de Poitiers est celui d’un homme qui s’érige en pape. Peu importe qu’il n’ait ni tiare ni sacré collège, il usurpe le même pouvoir et la même inviolabilité que les successeurs de saint Pierre.

Voilà les deux faces de ce vigoureux caractère. Il eut de grandes et rares qualités ; mais il en eut tous les défauts. Il fut ferme jusqu’à la dureté ; il fut prompt jusqu’à l’emportement ; il poussa la haine du mal jusqu’à la haine des malfaiteurs, et le respect de ses convictions jusqu’au mépris de toute autre croyance. C’est bien, comme on l’a dit, un des héros de l’espèce humaine, mais un de ces héros qui se jettent dans les extrêmes, un de ces violents que l’humanité admire et redoute, et qui ravissent les royaumes de la terre aussi bien que le royaume des cieux. — Au reste, ses défauts ne lui furent pas inutiles. Il fallait un homme comme lui, un homme de fer, inflexible dans ses principes, impitoyable dans sa conduite, pour contenir le flot débordé de la révolution religieuse.

Calvin était né pour l’apostolat. Jamais affection terrestre ne vint le détourner de son œuvre. Il est