Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/144

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

justesse et de force, il apercevait les côtés faibles d’un premier plan, et recommençait sur un second. L’harmonie des détails et de l’ensemble, la juste distribution des parties, le mouvement logique combiné avec le mouvement oratoire, une sorte d’organisme capable de faire circuler la vie jusque dans les derniers rameaux de la pensée : voilà ce qu’il cherchait pour chacun de ses ouvrages, et voilà aussi, je pense, ce qu’il n’appartient à personne de chercher pour lui.

Si rapide que fût sa conception, elle suivait pourtant une marche progressive. Il allait creusant de plus en plus son sujet, cherchant à l’embrasser dans son entier, et à le pénétrer dans sa profondeur. À chaque progrès dans ce travail, devait correspondre une vue plus étendue et plus juste des développements nécessaires à la pensée et de leur distribution la plus favorable. De là l’incertitude qui nous étonne dans les notes de Pascal relatives à son plan. De là aussi la valeur très contestable de ces notes elles-mêmes. Elles n’indiquent pas le plan définitif des Pensées ; elles n’indiquent que le point où en était Pascal à tel ou tel moment donné, dont la détermination n’est pas possible.

De nos jours on ne sait plus ce que c’est que d’élaborer avec lenteur et conscience une pensée à laquelle on laisse le temps de mûrir. Tout le monde court, même les écrivains. Tant mieux si l’on fait