Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/364

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à la fois sensation, sentiment et pensée, image, chant et idée, a des élans soudains, des inspirations immédiates. L’instinct, la conscience, le goût, participent de cette rapidité. On en conclut qu’ils répondent à des facultés simples et spontanées ; il faut en conclure, au contraire, que l’âme est tout entière dans les divinations de l’instinct, dans les mouvements de la conscience et dans les impressions du goût. Ce qui est spontané, c’est ce qui tient à tout le moi et le réfléchit dans son ensemble.

De même que le tempérament est le résultat de l’organisme et du jeu des fonctions vitales, le goût est le résultat du caractère, de l’éducation et de l’ensemble de la vie intellectuelle. De là vient qu’on peut fort bien disputer du goût, mais que ces disputes ne sauraient aboutir à une conclusion précise. L’influence en est semblable à celle que deux individualités exercent à la longue l’une sur l’autre en se rapprochant et se pénétrant mutuellement.

Mais le goût, fût-il réellement une faculté à part, nous n’en serions pas plus avancés. Qu’attendons-nous de lui ? Qu’il fasse ce que n’ont pas fait les théories ; qu’il nous serve de boussole pour nous orienter sur les flots incertains de la critique. Or on pensera du goût tout ce qu’on voudra, ce qu’on peut le moins en attendre, c’est justement ce que nous lui demandons. M. Littré ne nous a pas laissé ignorer que cette faculté du goût varie d’homme à