Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/57

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à ce point de démence et de fureur, qu’ils tiennent pour suspect tout ce que nous disons. Aussi, quand je prétendrais qu’il fait jour en plein midi, ils commenceraient tout aussitôt a en douter.

En même temps il écrivait à Sulzer, pasteur de l’église bâloise, insistant avec force sur l’impiété de Servet. Cette lettre fut portée par le trésorier DuPan, homme très bien disposé dans cette affaire, disait Calvin, et qui ne reculera pas devant l’issue que nous souhaitons.

Les réponses des églises dépassèrent l’attente de Calvin. Elles furent unanimes à voir dans ce grand procès une cause qui intéressait la chrétienté tout e ntière, et à conseiller des mesures énergiques :

Nous prions le Seigneur, dirent les pasteurs de Berne, qu’il vous donne un esprit de prudence, de conseil et de force, afin que vous mettiez votre église et les autres à l’abri de cette peste. — S’il se montre incurablement ancré dans ses conceptions perverses, disaient ceux de Bâle, réprimez-le selon votre charge et le pouvoir que vous tenez de Dieu, de telle sorte qu’il ne puisse plus dorénavant inquiéter l’Église du Christ, et que la suite ne devienne pire que le commencement.

Ces réponses décidèrent du sort de Servet. Aucune ne prononçait les mots de condamnation à mort, mais toutes les sous-entendaient. Les magistrats indécis, entraînés par ces conseils unanimes, s’unirent aux adversaires décidés de l’hérétique, et formèrent dans le conseil une majorité contre lui.