Page:Ramuz - Aline, 1905.djvu/96

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— Ça me pique, c’est comme du poil.

— C’est que c’est de la bonne étoffe.

Mais, parfois aussi, ils parlaient du passé. Elle regrettait le temps perdu sans Julien. Quand on aime, le temps où on ne s’est pas aimé est comme une belle robe qu’on n’a pas mise.

— Sais-tu, disait-elle, j’étais toute petite, j’avais une poupée ; un jour, elle est tombée dans le ruisseau, on l’a repêchée avec une grande perche, seulement le son avait fondu. J’ai bien pleuré. À présent, ça m’amuse, mais j’ai eu beaucoup de chagrin.

Et il disait :

— C’est comme moi, une fois que je m’étais fourré dans les pois. C’est pas bien grand un carreau de pois, pourtant c’est haut ; quand on y est on ne voit plus rien ; ça a des branches qui cachent tout,