Page:Ramuz - Joie dans le ciel.djvu/127

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il continuait à se tenir devant son tableau où toutes les choses étaient belles ; c’était, sur son tableau, comme si elles ne l’étaient plus.

Tout était trop beau, à présent. Ce n’était plus comme dans l’ancienne vie. Autrefois, dans cette ancienne vie, on avait un cœur qui était comme le ciel, c’est-à-dire le plus souvent gris, tandis qu’à présent chaque jour le soleil entrait par les vitres, faisant fidèlement briller autour de Chemin les objets taillés dans le beau mélèze rose ou dans du cœur de sapin qui sent bon. Autrefois, on n’était presque jamais content de soi, un jour tous les dix jours tout au plus, une fois toutes les deux semaines. Les dimanches, du cœur étaient rares, en ce temps-là. Chemin tapotait contre l’établi sa pipe restée à moitié pleine. On n’avait goût à rien, on n’avait même pas goût à son tabac, parce qu’on