Page:Ramuz - La grande peur dans la montagne, 1926.djvu/134

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
136
LA GRANDE PEUR

Elle tâche de le rejoindre ; elle se heurte partout à de la nuit et au silence, l’apercevant, ne l’apercevant plus ; il a été devant le feu, puis sur le lit, puis il n’y est plus ; il dort, il est réveillé, elle le voit qui s’assied dans la paille ; il est seul, non, il n’est pas seul ; elle ne sait plus, pour finir. Ça ne compte pas, la pensée !

« Si je venais pourtant, si j’arrivais tout à coup, pour de bon ? »

Ils ne pourraient pas me renvoyer ; on serait les deux, et, à cause de la maladie, ils ne pourraient pas me renvoyer.

Ils doivent avoir besoin d’une femme. Je balayerais, je ferais la soupe, je laverais les ustensiles. Il me prendrait contre lui, on n’aurait pas peur, on serait les deux…

Elle s’était mise à réfléchir. Il sonne onze heures. Il sonne minuit.