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DANS LA MONTAGNE

seraient postés en demi-cercle pour l’attendre ; mais elle ne lui faisait pas peur, au contraire ; il fait de nouveau partir un coup de fusil ; c’était bien avant le lever du jour.

Il redescendrait. Il avait sa carabine. On ne le verrait pas approcher. Il pourrait choisir sa position. Il en choisirait une d’où il prendrait le pont en enfilade.

L’écho vient encore une fois, s’est affaibli, meurt tout à fait ; — lui tient dans ses mains sa carabine chaude ; tout est mort, tout se tait ; il voit qu’il est seul, — ce n’est plus elle qui est là-bas.

Il s’est dit : « Ce n’est pas la peine de redescendre. »

Il y avait deux nuits qu’il n’avait pas dormi ; il est devenu raisonnable, ayant passé le bras dans la bretelle de son arme ; puis il met les mains dans ses poches ; et en même temps qu’il devenait raisonnable, il devenait toujours plus triste dans son cœur.

Ayant soupiré longuement, pendant qu’il s’est remis en marche ; pendant qu’il se dit : « C’est vrai : ce n’est plus elle qui est là-bas… À quoi est-ce que ça servirait ?… »

Puis, tout à coup, il commence à marcher à grands pas, puis il va à tout petits pas, il