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LA GRANDE PEUR

moment leur veste ; puis, avant de descendre l’escalier, ils se tenaient un moment encore sur le perron.

On doit dire qu’une des questions qui se posaient était de savoir si le Président viendrait à l’enterrement.

On a donc vite regardé encore s’il n’était pas peut-être déjà là, parce qu’on était curieux de savoir ce qu’il ferait, depuis le temps qu’il se cachait, et depuis bien des jours déjà il ne sortait plus guère ; car il ne rencontrait personne qu’il ne fût arrêté ou qu’on ne lui criât : « Tout ça, c’est de votre faute ! » ou encore on le menaçait et les femmes lui faisaient le poing. Il ne restait plus que quelques jeunes gens et certains de ses amis pour continuer à le défendre ; c’est pourquoi le Président ne se montrait plus.

Et est-ce qu’il allait venir à l’enterrement ? car, n’y pas venir, c’était offenser la famille et peut-être qu’y venir c’était l’offenser également ; en tout cas, c’était risquer un mauvais parti ; on était curieux de savoir ce qu’il ferait, s’il viendrait ou non ; on regardait donc s’il était déjà arrivé, et il n’était pas encore arrivé ; — puis, juste comme la cloche finissait de sonner, il arrive.