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DANS LA MONTAGNE

Il écoute encore, on écoute :

— Sûrement que c’est eux qui viennent. Attention à nous !

On s’était mis à courir de nouveau, tout le monde s’était mis à courir de nouveau ; cette fois, les femmes couraient avec nous. On est sorti du village, on allait sur le chemin du côté de la montagne. À peine si on y voyait. On distinguait pourtant le chemin avec netteté, à cause de sa couleur, et on pouvait sans peine le suivre des yeux parmi les prés jusqu’à la forêt. On voyait également très bien comment, un peu avant d’arriver à la forêt, il passait devant un fenil, et on voyait le fenil ; on a vu aussi que ceux du fenil étaient sortis avec leurs armes, barrant le chemin au-dessus de nous. On regardait le chemin, on regardait tous le chemin vers l’endroit où il débouche de dessous les arbres. C’est pourquoi on s’était arrêté, c’est pourquoi il se faisait de nouveau un arrêt dans le mouvement de nos pieds sur la terre dure. Et, cette fois, dans ce nouveau silence, c’est tout près de nous que la sonnerie a éclaté ; puis, ceux du fenil n’ont eu que le temps de se jeter à droite et à gauche du chemin, comme nous aussi on a fait, du moins on a tâché de faire, mais on était