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LE RAISIN VERT



PREMIÈRE PARTIE




I


L’appartement qu’Isabelle avait découvert dans un quartier de l’ouest, voisin du Bois, n’offrait aucun des avantages du confort moderne, ce qui en mettait le loyer à la portée d’une bourse moyenne, mais il était largement pourvu de ce confort ancien, qui savait ménager à chacun l’espace et le silence et cette faculté de divorce provisoire, condition nécessaire de la vie de famille.

Les enfants virent surtout que l’on y pouvait galoper sans être tout de suite arrêté par un mur, et que, M. Durras une fois retranché dans son bureau, — une grande pièce prolongée par une alcôve à l’ancienne mode, — il ne percevrait aucun écho de leur vie habituelle : les batailles, les jeux, le ballet du Feu qui se dansait en lançant en l’air des brûlots de papier de soie et les cris que poussait Lise lorsque son frère, se jouant diaboliquement de sa riche imagination, lui disait d’un air consterné : « Ô malheureuse ! Tu es un missionnaire capturé par les bandits chinois et je vais être obligé de te faire mourir en te chatouillant la troisième côte. »