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Plus belle que la vie égoïste et sans foi.

le vieillard, avec ironie.

C’est un grand enchanteur, je le vois ; mais, dis-moi,
(Car poésie et moi ne nous connaissons guère)
De quel temps était-il ce poëte de guerre
Par qui les cœurs sont grands et les corps abattus ?

le jeune homme.

Il est contemporain de toutes les vertus !
Deux cents ans ont passé sur les vers du grand homme,
Ils sont vieux ses Romains, plus Romains que dans Rome,
Polyeucte, d’un bond dans le ciel emporté ;
César disant : Clémence ! et Cinna : Liberté !
Deux siècles, les combats de Rodrigue et Chimène
Nous ont fait respirer toute grandeur humaine ;
Deux siècles nous avons entendu les défis
De Gormas et du Cid, d’Horace et de ses fils.
Mais chaque fois qu’un cœur se déchire lui-même,
Qu’il immole au devoir tout, même ce qu’il aime,
Et, plus fort que les sens, de soi-même est vainqueur,
C’est Corneille vivant qui chante dans ce cœur !
Chaque fois qu’un œil fier s’allume à l’injustice,
Chaque fois qu’un héros s’élance au sacrifice,