Page:Rattazzi - Le piège aux maris, 1865.djvu/57

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la dernière accolade, Fanfan qui le saisit par le poignet , lui glisse de force quelque chose dans sa poche, et lui dit tout d’une haleine :

— Est-ce qu’on part comme ça ! Est-ce que le gouvernement, qu’il dit, dit-il, comme dit c’t’autre, donne cent sous par jour aux fantassins, pour boire bouteille. Et, que tu vas me prendre ça et un peu vite, grand nigaud, que je t’embrasse !

— Fanfan ! mon frère !

— Ton frère ! ça y est. Tiens ferme, que je tape !

Le train part. Il est parti. Les voyageurs s’accotent, se tassent dans les wagons. Les uns s’endorment, les autres songent, d’autres regardent au dehors. Tantôt leurs yeux se lèvent vers le ciel tout constellé d’étoiles, tantôt ils essaient de compter les arbres noirs et fantastiques. Divers tableaux se succèdent. Après la nuit blanche semée de grandes ombres, c’est la bande lointaine de lumière qui s’élargit et s’étend sans cesse, tournant du gris au blanc, du blanc au jaune, du jaune au rouge pourpre ; c’est le jour qui renaît avec sa gaieté et sa vie. La nature immuable