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Page:Rattazzi - Le piège aux maris, 1865.djvu/60

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M. Sainte-Hélène avait, depuis vingt ans, un habit qu’il brossait chaque matin, mais qu’il ne mettait jamais : l’hiver, il allait vêtu d’un gilet à manches, et l’été, il allait sans gilet. Le digne concierge avait dépassé la soixantaine, mais il se tenait droit, et ses gestes étaient empreints d’une raideur toute militaire. Son bras, lorsqu’il le remuait, décrivait des angles droits. Son front, dépouillé de cheveux, était étroit et fuyant vers le crâne. Le bas de sa figure, presque entièrement couvert par une immense moustache grise, était large au contraire et formait la base d’un triangle dont le front représentait assez bien le sommet. Cette tête reposait sur un col de crin noir qui lui étreignait le con comme un carcan. C’est, sans doute, à cause de ce col que le bonhomme ne mettait pas d’habit : car si l’on n’avait pas vu ses manches d’une blancheur éclatante, on aurait pu croire qu’il n’avait pas de chemise, tant le col de crin dissimulait le col de calicot. M. Sainte-Hélène, propre, méthodique, silencieux, ignorait le nom des locataires, et s’en remettait à sa femme pour tout ce qui regardait l’administration de la maison. Les mauvaises langues partaient de là pour dire que