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des deux Indes.
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ce peuple, qui étoit conquérant par la nature de ſa religion & de ſa politique ?

L’Angleterre ſe déchiroit pour les intérêts de ſa liberté ; la France, pour les intérêts de ſes maîtres ; l’Allemagne, pour ceux de la religion ; l’Italie, pour les prétentions réciproques d’un tyran & d’un impoſteur. Couverte de fanatiques & de combattans, l’Europe entière reſſembloit à un malade qui, tombé dans le délire, s’ouvre les veines, & perd dans ſa fureur ſon ſang avec ſes forces. Dans cet état d’épuiſement & d’anarchie, elle n’auroit opposé aux Turcs qu’une foible réſiſtance. Plus le calme, qui ſuccède aux guerres civiles, rend les peuples redoutables à leurs voiſins, plus les troubles de la diſſenſion qui les diviſe les expoſent à l’invaſion & à l’oppreſſion. La conduite dépravée du clergé auroit encore favorisé les progrès d’un culte étranger, & nous ſerions ſans retour dans les chaînes de l’eſclavage. En effet, de tous les ſyſtêmes politiques & religieux qui affligent l’eſpèce humaine, il n’en eſt point qui laiſſe moins de carrière à la liberté que celui des Muſulmans. Dans preſque toute l’Europe, une religion étran-