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Histoire philosophique
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gère au gouvernement, & dont les premiers pas ſe ſont preſque toujours faits à ſon inſu ; une morale répandue ſans ordre, ſans préciſion, dans des livres obſcurs & ſuſceptibles d’une ſeule bonne interprétation, entre une infinité de mauvaiſes ; une autorité en proie aux prêtres & aux ſouverains, qui ſe diſputent tour-à-tour le droit de commander aux hommes ; des loix politiques & civiles ſans ceſſe en contradiction avec la religion dominante, qui condamne l’inégalité & l’ambition ; une adminiſtration inquiète & entreprenante, qui, pour dominer avec plus d’empire, oppoſe continuellement une partie de l’état à l’autre partie : tous ces germes de trouble doivent entretenir dans les eſprits une fermentation violente. Eſt-il ſurprenant qu’au milieu de ces mouvemens, la nature s’éveille & crie au fond des cœurs, L’homme eſt né libre ?

Mais, ſous le joug d’une religion qui conſacre la tyrannie, en fondant le trône ſur l’autel ; qui ſemble impoſer ſilence à l’ambition, en permettant la volupté ; qui favoriſe la pareſſe naturelle, en interdiſant les opérations de l’eſprit : il n’y a point d’eſpérance pour les grandes révolutions. Auſſi les Turcs, qui