Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v1.djvu/348

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
Histoire philosophique
326

Elle étoit trop ſimple, trop raiſonnable, cette doctrine, pour des inſulaires, dont l’imagination, naturellement inquiète, étoit encore exaltée par les cruautés du gouvernement. Quelques dogmes du chriſtianiſme, aſſez ſemblables à ceux des Budſoïſtes ; le même eſprit de pénitence dans les deux croyances, donnèrent des prosélytes aux miſſionnaires Portugais. Mais, indépendamment de cette conformité, on ſe ſeroit fait chrétien au Japon, ſeulement par haine du prince.

La religion nouvelle, ſuſpecte à la cour, devoit plaire aux familles détrônées. Elle y enflamma le levain de tous les reſſentimens. On aima un Dieu étranger que n’aimoit pas le tyran. Alors Taycoſama leva un ſceptre de fer, & frappa ſur les chrétiens, comme ennemis de l’état. Il proſcrivit les dogmes de l’Europe, & la proſcription les enracina dans les eſprits. Il dreſſa des bûchers, & des millions de victimes s’y précipitèrent. Les empereurs du Japon enchérirent ſur ceux de Rome dans l’art de persécuter les chrétiens. Durant quarante ans, les échafauds furent teints du ſang innocent des martyrs. Ce fut une ſemence de chriſtianiſme, mais auſſi de